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LE TRAVAIL A PIED
de Bernard Chiris

paru dans la revue Cheval Lusitanien Magazine-Avril/Mai 2008

L'ensemble des exercices demandés au cheval mené en main constitue le travail à pied. Il prépare et confirme le travail monté. Son domaine va des assouplissements les plus élémentaires au rassembler le plus abouti. Le travail à pied est une aide précieuse dans le dressage du cheval. Délicat à mettre en œuvre, il réclame une grande sensibilité du cavalier et une certaine expérience. Mais correctement exécuté, il apprend au cheval à s'équilibrer et à se placer, à s'arrondir, à se ployer et à se mobiliser dans la décontraction.

Objectifs du travail à pied

Il permet essentiellement d'établir une communication confiante entre l'homme et le cheval en réduisant grandement les contraintes physiques pour les deux partenaires. Il donne au cavalier une meilleure connaissance du cheval. Il permet à l'homme de sentir, d'affiner ses sensations, de comprendre et de tirer de ce travail d'utiles réflexions pour l'éducation du cheval. C'est par le travail à pied que se mettent en place les premiers outils du dialogue. Le cheval apprend à connaître la main, à en saisir toutes les nuances, et à répondre aux actions impulsives par l'action de la cravache utilisée délicatement. Un langage s'instaure, le cheval en apprend les codes. C'est un excellent moyen pour commencer les assouplissements, pour permettre au cheval de comprendre, d'apprendre et de confirmer les exercices de base. Il apaise les chevaux nerveux et éveille les chevaux assoupis, relaxe mentalement et décontracte physiquement le cheval. Il est aussi une excellente introduction à la séance de travail. Il est frappant de constater, après un travail à pied bien mené, la bonne volonté et le degré de disponibilité du cheval dès que le cavalier se met en selle !


© Chiris

Quelles règles doit-on respecter ?

Le cheval doit d'abord être mis en confiance, rester calme et décontracté à l'approche de l'homme. Ne commencez pas le travail à pied avant d'avoir bien détendu le cheval aux trois allures. Le travail à pied se fait presque toujours au pas, et plus rarement au trot. Commencez par des choses simples, respectez le principe de progressivité, allez du simple au compliqué. Travaillez toujours dans la relaxation, dans la lenteur, ne forcez jamais le cheval. Variez les exercices, travaillez aux deux mains. Faites des séances courtes.

 

Où se placer ? Comment tenir les rênes et la cravache ?

Le cheval est arrêté à main gauche le long de la paroi. Le cavalier se place à hauteur de la tête du cheval, au niveau de l'encolure, le buste et les épaules tournés de trois quarts face aux épaules du cheval. Il se tient droit, dans une attitude relaxée proche de l'attitude montée. Le corps et les épaules restent nettement dégagés du cheval. En aucun cas le cavalier ne se colle au cheval. Lorsque le cheval est en filet, la main gauche ou main intérieure, tient la rêne à quelques centimètres du mors de filet, paume vers le haut. La rêne passe directement entre le pouce et l'index. La rêne extérieure (rêne droite), passée par-dessus la base de l'encolure du cheval, juste après le garrot, est tenue par la main droite (main extérieure), à hauteur de l'épaule du cheval, ongles tournés vers le haut. Le cheval peut également être enrêné s'il en a l'habitude, et être tenu uniquement par le caveçon. La main intérieure tient alors la longe de façon souple et relaxée à une trentaine de centimètres de l'attache du caveçon et la main extérieure se contente de tenir la cravache. Une longue cravache est tenue par la main droite (main extérieure) comme un fleuret ou une canne à pêche. Elle est dirigée vers la cuisse interne du cheval.

Mettre le cheval en mouvement, marcher droit et arrêter

Commencez toujours par le côté le plus facile, et pour vous, et pour le cheval. Après avoir arrêté le cheval le long du mur, commencez par caresser le cheval sur tout le corps avec la cravache. Evitez les gestes brusques et rapides, soyez doux, récompensez souvent. Placez le cheval par de subtiles vibrations de doigts après avoir légèrement relâché les rênes. Lorsque le cheval est calme et attentif, qu'il cède dans sa nuque et mâchouille le mors, portez-le vers l'avant en le touchant délicatement à l'endroit du contact habituel de la jambe. Si le cheval n'avance pas, répétez deux ou trois fois la demande en associant la voix ou un appel de langue. Vous pouvez aussi toucher la cuisse du cheval. Portez-vous vers l'avant dans le même temps, sans chercher à tirer vers l'avant le cheval. Marchez quelques mètres et récompensez. Marchez ensuite sur le pourtour du manège en veillant à conserver un contact léger et bien égal entre les deux mains. Les rênes agissent de la même manière que lorsque vous êtes à cheval, avec une adaptation pour la rêne extérieure, passée par-dessus le garrot et amenée vers l'intérieur. Arrêtez de temps en temps le cheval et maintenez-le immobile. Faites-lui fléchir la nuque par de petites vibrations sur le filet afin de décontracter sa mâchoire. Répétez plusieurs fois ces cessions de nuque. Lorsque le cheval reste en place, la nuque immobile, fléchie et relaxée, portez-le de nouveau en avant et lâchez les rênes immédiatement après. Récompensez et recommencez aux deux mains jusqu'à ce qu'il s'arrête facilement, donne des flexions de nuque et reparte sereinement en conservant la cession de la mâchoire.

Conduire le cheval

Lorsque le cheval se déplace avec franchise et régularité aux deux mains le long de la paroi, droit et stable dans son placer, il est prêt à quitter la paroi du manège. Commencez alors à le conduire sur un grand cercle, en gardant un contact léger et attentif, en l'encadrant bien. Variez le diamètre des cercles, enchaînez cercles et voltes, cercles et lignes droites. Arrêtez le cheval à n'importe quel endroit du manège, dans le calme et la rectitude. Ne lui demandez rien de compliqué pendant plusieurs séances. Recherchez la pureté du pas, la rectitude et la décontraction.


© Chiris

 

Aborder l'épaule en dedans

Avant de demander au cheval de s'infléchir sur le travail de deux pistes, vous devez être vous aussi très décontracté ! Détendez-vous, éliminez toutes les contractions inutiles. Vous pouvez alors commencer à enseigner au cheval les pas de côté. Incurvez-le d'abord sur de petits cercles en contrôlant bien sa colonne vertébrale. Demandez-lui ensuite de s'incurver autour de vous sur une petite volte et commencez, par de légères touches de la cravache, à lui faire déplacer les hanches vers l'extérieur. Incitez-le peu à peu à se déplacer en pas de côté, en épaule en dedans. Puis à la sortie du passage du coin gardez lui les épaules vers l'intérieur afin qu'il se déplace en l'épaule en dedans le long du grand côté…

Apprendre l'appuyer

Une fois les épaules en dedans maîtrisées, passez à l'appuyer. Demandez une épaule gauche en dedans active et détendue, le long du grand côté, à main gauche. Passez le coin dans cette attitude, puis doublez sur la ligne du milieu. Au moment du doubler, envoyez les hanches vers l'extérieur tout en continuant à avancer. Dans le même temps, inversez le pli en écartant du cheval la main droite légèrement vers l'arrière, de façon discontinue. Cette action, renforcée par la cravache, donne le nouveau pli vers la droite et envoie les hanches à droite. Poussez l'avant-main du cheval vers la droite en direction de l'appuyer avec la main gauche, et réglez le déplacement des épaules. Veillez à vous déplacer dans le sens de l'appuyer au rythme désiré. Le cheval appuie vers la droite. Vous êtes placé sur sa gauche, au niveau de l'encolure. Votre main droite règle la rêne intérieure, votre main gauche, la rêne extérieure. La cravache devient la jambe extérieure. Les aides sont les aides classiques de l'appuyer, les actions sont identiques. Lorsque le cheval se livre bien dans ce travail, enchaînez alors toutes les figures possibles en travail de deux pistes, en passant fréquemment de l'épaule en dedans à l'appuyer, en changeant ou non de pli. Ne bousculez pas le cheval, ne précipitez pas les allures. Il doit travailler dans une cadence lente afin de pouvoir se déplacer avec des gestes amples et relaxés. C'est un travail d'une grande délicatesse qui requiert beaucoup d'attention, aussi bien de la part du cheval que du cavalier. Il est le plus court chemin vers le rassembler.

 


© Chiris

A la recherche du rassembler

Le travail à pied, harmonieusement conjugué avec le travail monté et le travail en longe est un outil extraordinaire pour rassembler le cheval et commencer à le faire diagonaliser. Libéré du poids du cavalier, léger et bien dans la mise en main, le cheval se mobilise avec plus d'aisance. Les postérieurs, plus facilement sollicités par la cravache s'engagent davantage sous la masse, le cheval s'équilibre sur les hanches. C'est encore souvent à pied que l'on commence et que l'on améliore le piaffer, le passage et le pas espagnol. Le travail a pied est un outil merveilleux lorsqu'il est pratiqué avec tact…N'hésitez pas à l'aborder !

Bernard CHIRIS
Photos: Séverine BERNARD et HIDALGO sous la direction de Bernard CHIRIS

 

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